Quand le Sexe se transforme en Amour

Mon parcours d’homme a débuté bien simplement par ce « non » affirmé qu’elle m’a servi jadis pour m’exprimer son refus du statu quo. Je ne parle pas ici d’un « non pas ce soir chéri j’ai mal à la tête » mais plutôt d’un « non tout court ce n’est plus possible pour moi dans ces conditions ». Colère, tristesse et ruminations mentales (« j’aime mieux partir que de vivre sans sexualité »), m’ont traversé en coup de vent, mais sans me faire bouger vraiment. Au fond de moi je ne pouvais me résoudre à quitter notre navire.

Force m’était de constater que ce que nous appelions « faire l’amour » nous éloignait peu à peu l’un de l’autre. J’avais de plus en plus de mal à ressentir l’amour, à voir des étoiles dans nos yeux fatigués par la routine d’un quotidien rythmés par le travail, les enfants et toutes nos obligations entassées dans le calendrier. La sexualité était devenue un sujet de discorde et sombrait peu à peu dans les silences pesants qui s’accumulaient sous le tapis de notre chambre à coucher. Mais qu’est-ce qui m’échappait ? Quelle était cette clef qui m’ouvrirait de nouveau les portes de son espace sacré ?

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Profondément enfoui en chacun se trouve un espace intemporel, un « lieu » de paix, où je n’ai rien à faire, où mes batteries se chargent sans efforts, où je peux ressentir intensément cette joie pure et nue qui existe sans raison. C’est bien là, dans mon centre le plus profond, que je peux vraiment être en connexion avec ce que je suis vraiment, avec cet autre, au-delà de toutes mes protections et des histoires que je peux me raconter.

C’est un long chemin pour y « descendre », pour y plonger, pour oublier le temps. C’est même un chemin sans fin et pourtant, chaque respiration peut m’y emmener si je choisis d’y poser toute mon attention. Une respiration à la fois (courage et persévérance) et tout ressentir ce qui existe à l’intérieur sans chercher à trier, sans repousser du cœur ce que j’ai appris à détester de moi.

Et dans l’Éternel Présent, qui se tient silencieux au milieu de tous les tourbillons, mes caresses deviennent des œuvres d’art, nos mouvements une danse cosmique et nos yeux des fenêtres ouvertes sur la voute étoilée. Dans cet espace pacifié, il n’y a plus d’objectif obligé, de « bon port » à trouver, simplement la gratitude partagée d’être reliés par le cœur et par le corps, pour vivre enfin, cette Vérité plus grande, celle qui nous dépasse et qui nous est offerte à tous, à chaque instant.

Cette Présence à soi, à l’autre est la clef qui a tout changé. À travers elle le Sexe se transforme en Amour, à travers elle, chaque rencontre vous rapproche l’un de l’autre. Et ça aussi, c’est un chemin sans fin.

~Jean-Philippe Ruette