Au début de mon adolescence j’ai découvert une façon très efficace de soulager mon stress quotidien. Je n’avais qu’à me caresser pour faire monter l’excitation jusqu’à ce point de non-retour au-delà duquel je me retrouvais les yeux mi-clos, pour quelques délicieuses secondes, dans cet espace intemporel où je pouvais tout oublier. De l’autre côté de cette traversée je dérivais paisiblement dans un état second où toute tension semblait m’avoir quitté.
Je ne le savais pas encore, mais ce premier contact avec la sexualité s’imprimait dans mon corps en traçant un profond sillon. À partir de ces premières expériences mon corps avait décidé que c’était de loin LA meilleure façon de me délester de mon stress quotidien. Quand je suis arrivé à l’âge où s’amuser tout seul ne suffit plus, j’ai continué sur la même lancée en supposant qu’elle aussi avait ce même besoin. Ce n’est que beaucoup plus tard que j’ai réalisé qu’il n’en était rien.
Le premier signe a été sa fermeture graduelle à mes avances et son désintérêt face à tout ce que je proposais en guise d’intimité. Puis, la sexualité est devenue un terrain miné source de discorde et de frustration. Finalement un jour elle a osé me dire que toute cette tension que je déchargeais passait en elle et s’ajoutait comme un fardeau à son propre stress accumulé. Elle ajoutait qu’elle en avait parfois pour des jours à vivre des montagnes russes émotionnelles…
Ce n’est pas facile à entendre j’en conviens mais aujourd’hui je suis profondément reconnaissant qu’elle m’ait partagé sa vérité. Depuis je m’efforce d’évacuer mon stress autrement pour me présenter devant elle le cœur plein. Depuis je constate, émerveillé, que son corps s’est réouvert parce qu’il reçoit maintenant ce dont il a vraiment besoin : de l’amour.
~Jean-Philippe Ruette