Secret d’alcôve

À la racine de mes frustrations se trouve bien souvent le même malentendu répété à l’infini : je lui offre ce que j’aime recevoir et non ce qu’elle désire! Inconsciemment je suppose que nous sommes fait pareils. En observant attentivement nos zones de frictions j’ai fini par découvrir qu’elle n’était pas pareille à moi mais ô combien complémentaire. Évidemment il y a sans doute de nombreuses exceptions, mais voici quelques observations qui sont vraies pour nous.

C’est par le sexe que je veux d’abord me connecter à elle. J’ai besoin de faire l’amour pour ouvrir mon cœur. C’est par le cœur qu’elle veut d’abord se relier à moi. Elle a besoin de sentir nos cœurs complices avant de m’ouvrir son corps. Avant l’amour j’aime qu’elle touche directement mon sexe avant d’aller ailleurs. Pour elle c’est précisément le contraire : d’abord tout le corps, de la périphérie vers sa poitrine, et beaucoup plus tard vers son sexe.

Quand je suis trop pressé d’entrer en elle, son corps se referme de lui-même. Il se protège. Lenteur et présence sont les clefs qui m’ouvrent les portes de son temple sacré. Quand elle est trop pressée d’entrer dans mon cœur, celui-ci se ferme. J’ai un grand besoin de sécurité pour dire les émotions qui s’y trouvent.

Quand je parle de mes problèmes c’est surtout pour avoir des pistes de solutions. Quand elle me parle des siens c’est souvent pour être vue, entendue, et au besoin, trouver elle-même ses propres réponses. Dans le doute je lui demande parfois : « veux-tu de l’écoute ou des solutions? »

J’ai tant besoin de ce qu’elle m’offre et vice-versa! Si j’ai mis toutes ces années à le voir ce que je m’entêtais à ne regarder que mon propre côté de la médaille, celui qui faisait mal, celui qui avait l’impression de tout donner sans jamais recevoir. Et puis j’ai fini par comprendre à quel point nos frustrations se répondaient, à quel point nous avions ce même élan de connexion profonde, cet élan de vivre corps et cœurs entrelacés.

Jean-Philippe Ruette