La souffrance a bien des visages… Qu’elle soit physique, mentale, émotionnelle… je ne pense pas me tromper en disant que nous la connaissons tous intimement. Pourtant, malgré son omniprésence, je ne crois pas qu’elle soit vraiment obligatoire. Non, j’ai plutôt l’impression qu’elle est surtout là pour m’obliger à sortir de mon fauteuil trop moelleux dans lequel j’aime m’endormir… et prendre racine.
C’est mon cas ces temps-ci. Depuis un moment déjà mon corps se plaint volontiers d’un manque d’attention et je passe une partie de mes journées à danser avec cette vieille connaissance pour qui j’ai des sentiments disons partagés… Ma première réponse et souvent de lui résister. C’est normal, je n’aime pas souffrir ! Pourtant, même si la tentation est grande, je sais qu’il est vain de vouloir la chasser d’un coup de baguette magique. « Ce à quoi on résiste persiste » dit-on. Il m’arrive encore de l’oublier…
Après avoir tenté sans succès de la tenir au loin, de la repousser, de lui FAIRE face… j’ai dû me rendre à l’évidence et lâcher prise devant son avancée inexorable. Comme l’enfant qui ne sait rien je me suis finalement retrouvé tout nu devant elle, sans plan A, ni B, ni même Z. Dans ces moments-là on se retrouve alors au cœur d’un grand vide, dans un espace inconnu, sans balise et sans mot.
Et paradoxalement, c’est au cœur du vide, du Silence – quand le mental s’est finalement effondré – que l’on Se retrouve enfin, libéré du « bruit » qui recouvrait cette antique sagesse innée que nous possédons tous par-delà nos écrans. Depuis, je continue à danser avec la souffrance (qui s’est beaucoup atténuée)… mais au lieu de lui résister, je la laisse plutôt me reconduire chaque jour vers les rivages silencieux de ce Grand Océan qui s’ouvre dans mes profondeurs… et que j’avais un peu déserté.
Depuis, je prends un temps quotidien pour plonger en moi, pour me laisser bercer par les flots, pour écouter la musique des vagues, pour ÊTRE. Et de cet ÊTRE peu à peu je sens émerger un nouveau FAIRE, plus aligné, plus cohérent, plus en harmonie avec cet éternel va-et-vient… qui rythme le Grand Océan… qui nous appelle… qui nous rappelle… notre seule vraie Maison.
~Jean-Philippe Ruette