Sous bien des dehors la vie de couple peut offrir un certain confort. Pourtant, en y regardant de plus près, il faut bien avouer qu’elle vient aussi avec son lot de défis, ses bords tranchants, ses angles morts. Qui n’a pas de frustrations, de colères refoulées, de tristesses inavouées quand vient le moment de faire le bilan de son histoire à deux ?
Quand ces émotions émergent enfin de mon inconscient il est au moins deux façons de m’en occuper. La première, de loin la plus répandue, est de les projeter sur l’autre. C’est assez facile à faire. Je n’ai qu’à parler en TU pour lui dire à quel point il devrait changer pour que je retrouve le sourire. C’est la méthode idéale pour maintenir le statu quo…
La seconde méthode encore marginale, implique un changement radical de perspective : je prends la responsabilité de ce qui se vit à l’intérieur de moi. Il n’est plus question de projection sur l’autre mais de réflexion. L’autre devient le miroir qui me révèle ce qui en moi a désespérément besoin de mon attention.
Un exemple vaut mille mots. Ma compagne s’entête à répéter inlassablement le même comportement qui me contrarie jour après jour. Dans ma tête c’est vraiment la chorale des chacals qui n’en finissent plus de la juger, de la réprimander, de la condamner. Dans mon cœur c’est douloureux, dur et froid.
Avec la première méthode la voie est claire. Elle est coupable et doit changer pour se conformer à ma vision des choses. Avec la seconde méthode je sais qu’inconsciemment (ou pas) elle essaie de me dire quelque chose, de me faire un reflet que je vais explorer en remontant le fil de mes émotions.
Je ressens intensément, j’offre une dose d’amour à ce qui souffre en moi. L’accueil (sans jugement) permet au message de me toucher. Ah oui, je vois mieux maintenant… À travers son jeu de rôle elle me reflète la façon dont je me traite moi-même. Cette façon que j’ai de me juger, de me réprimander, de me condamner quand je me laisse aller à de tels comportements.
Elle m’offre un cadeau (mal emballé disent mes chacals !) en me présentant une croyance, un automatisme qui m’a permis de survivre certes (merci !) mais qui maintenant m’étouffe et me garde prisonnier du passé. Que d’opportunités se dévoilent enfin quand je cesse de travailler sur l’image dans le miroir pour tourner résolument mon regard bienveillant sur la cause, qui bien souvent se trouve dans un angle mort qui demande à voir le jour.
Merci mon adorée d’être si belle, si vraie dans ce miroir tendu du bout du cœur, tendu avec tant d’amour que quelque chose en moi peut enfin s’ouvrir, désarmer et se remettre en mouvement dans le flot de la vie, dans cette rivière éternelle qui depuis toujours coule de cœurs en cœurs.
~Jean-Philippe Ruette